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Cancers pédiatriques : le Sénat bloque un amendement visant à mieux financer l’Institut national du cancer

Dans le cadre de l'examen de la proposition de loi "Prise en charge des cancers pédiatrique", le groupe Communiste, Républicain, Citoyen et Ecologiste (CRCE) au Sénat a déposé un amendement visant à la création d’une contribution sur le chiffre d’affaires des laboratoires pharmaceutiques afin d’augmenter les moyens de l’Institut national du cancer (INCa) notamment sur la recherche des cancers pédiatriques.

Bien qu'une telle mesure ne relève que du bon sens et mérite d'être débattue, la Commission des finances a tout bonnement déclaré cet amendement irrecevable.
Le motif : l’augmentation des moyens de l’INCa conduirait inévitablement à l’augmentation des dépenses de l’Institut.

Au delà du caractère troublant d'une telle justification, c'est l'atteinte au droit d'amendement des parlementaires qui pose sérieusement question..
A l'heure d'une crise démocratique qui n'a que peu de précédents dans notre pays, cet exercice de censure ne doit pas passer inaperçu.

Nos institutions de recherche médicale ne roulent pas sur l'or et leur financement repose pour une part importante sur les dons de particuliers, surtout pour ce qui est de la recherche contre le cancer.

Des solutions existent, l'amendement du groupe CRCE le montre bien, encore faut-il qu'il y ait une volonté politique d'agir dans ce sens.
Intervention du groupe CRCE ci-dessous

 

 

Intervention de Laurence Cohen pour le groupe CRCE
sur la proposition de loi ''prise en charge des cancers pédiatriques''

Monsieur le Président,                                                      

Madame la Ministre,

Mes chers collègues,

Avant de discuter du contenu de la proposition de loi déposée par nos collègues du groupe UDI, je souhaite revenir un instant sur le sort du seul amendement que nous avions déposé et qui a été déclaré irrecevable article 40.

J’attire l’attention de l’ensemble de mes collègues sur cette irrecevabilité dont le raisonnement remet en question notre droit fondamental d’amender les textes de lois.

Notre amendement visait la création d’une contribution sur le chiffre d’affaires des laboratoires pharmaceutiques afin d’augmenter les moyens de l’Institut national du cancer notamment sur la recherche des cancers pédiatriques, ce qui vous en conviendrez ne serait pas un luxe !

La Commission des finances a déclaré irrecevable notre amendement, en raison de, je cite:

« qu’il crée une contribution prélevée sur le chiffre d’affaires des laboratoires pharmaceutiques dont le produit serait affecté à l’Institut national du cancer (INCa), opérateur de l’État dont le financement est quasi exclusivement issu de subventions pour charge de service public, cet amendement a pour objet d’augmenter la capacité à dépenser de l’INCa et crée donc une charge au sens de l’article 40 de la Constitution ».

Notre amendement a donc été retoqué au motif que l’augmentation des moyens de l’Inca conduirait inévitablement à l’augmentation des dépenses de l’Institut.

Ce raisonnement n’a ni queue ni tête ! Ainsi donc, ce serait les moyens qui créeraient les besoins ? Remarquez, c’est ce raisonnement qu’ont défendu les gouvernements successifs depuis des dizaines d’années, notamment en matière de santé et que vous poursuivez, Madame la Ministre, en limitant l’offre de soins !

Déjà que nous ne pouvons amender un texte si on augmente les dépenses de l’Etat voici que maintenant nous ne pourrons pas non plus augmenter les ressources de l’Etat. C’est une façon supplémentaire de nous empêcher de sortir des rails de la politique gouvernementale quel que soit le gouvernement.

J’alerte solennellement l’ensemble des groupes politiques présents dans l’hémicycle sur la restriction du droit parlementaire en cours.

D’autant que cette décision va dans le sens de l’intimation qui nous a été faite de voter ce texte conforme.

Attention mes Cher.e.s Collègues, cette remise en cause du droit d’amendement renforce celles et ceux qui pensent qu’il faut supprimer le Sénat et sont convaincus de l’inutilité des parlementaires que nous sommes. Evitons de leur donner le bâton pour se faire battre.

Pour notre part, au groupe CRCE nous ne céderons pas à ce genre d’injonctions, véritable censure déguisée et cela nous renforce à défendre une 6ème République, respectueuse de la démocratie directe et indirecte.

Venons-en à la proposition de loi visant à renforcer la prise en charge des cancers pédiatriques pour la recherche, le soutien aux aidants familiaux, la formation des professionnels et le droit à l’oubli.

Actuellement le cancer est un fléau qui touche 2 500 enfants et adolescents par an, dont 500 décèdent. Si les cancers demeurent des maladies rares par rapport aux adultes, avec 400 000 nouveaux cas par an, il existe une soixantaine de cancers pédiatriques différents, dont les origines, le développement et les manifestations ont peu à voir avec ce que l’on connaît des cancers qui touchent les adultes.

Cette spécificité justifie la sanctuarisation d’un budget pour la recherche sur les cancers pédiatriques.

En France, jusqu'à cette année, seulement 3 % du budget de l’Institut national du cancer (Inca) étaient dépensés pour les enfants. Et les associations estiment le besoin de financement de la recherche en oncologie pédiatrique entre 18 et 20 millions d’euros.

Le gouvernement a été contraint de faire un geste en ajoutant 5 millions d’euros à l’Inca lors du projet de loi de finances pour 2019 mais nous ne sommes pas encore au niveau demandé par les associations.

La question des moyens destinés à la recherche contre le cancer pédiatrique aurait dû par conséquent être la priorité de ce texte, or rien n’est prévu sur ce sujet.

C’est la raison qui nous a conduits à déposer notre amendement  mettant à contribution les bénéfices des laboratoires pharmaceutiques au financement de la recherche oncologique pédiatrique. Avec son rejet avant examen comme je l’ai expliqué.

Le texte se contente de coordonner autour de l’Inca la recherche en cancérologie pour fixer un plan quinquennal en faveur des cancers pédiatriques.

Pour faire avancer la recherche sur les cancers spécifiques aux enfants, l’article 2 prévoit de faciliter la participation des mineurs aux essais cliniques. Et nous sommes sensibles aux garanties fixées par le texte, tant la chronique a été défrayée par des accidents parfois dramatiques survenus auprès d’adultes.

Ainsi, il est prévu que la participation des mineurs dans des essais cliniques se fera sous la vigilance de l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et des comités de protection de personnes. Permettez-moi d’être dubitative quant aux possibilités de cette agence à qui on demande toujours plus avec toujours moins ! D’où notre abstention sur cet article, car des garanties ne peuvent être solides en absence de moyens supplémentaires !

Par contre, nous soutenons la proposition de déplafonner la prestation afin de couvrir la pathologie dans son intégralité allant dans le sens de la bataille de l’union nationale des associations de parents d’enfants atteints de cancer et de leucémie en faveur de la revalorisation de l’Allocation journalière de présence parentale (AJPP),

La proposition de loi prévoit également d’assouplir les conditions de bénéfice du congé de présence parentale et de l’allocation journalière afférente en tenant compte de la durée et des conséquences des traitements ce qui est un progrès par rapport à la situation actuelle.

Nous regrettons néanmoins la suppression par la majorité gouvernementale, à l’Assemblée Nationale, des articles prévoyant d’intégrer les cancers pédiatriques dans le processus de formation continue des professionnels et l’extension du droit à l’oubli aux jeunes âgés de dix-huit à vingt et un ans, dès cinq ans après leur rémission, contre dix ans aujourd'hui.

Nous regrettons enfin que le texte ne prévoit pas de dispositions pour le financement d’études sur les facteurs environnementaux dans la survenue d'un cancer chez l'enfant.

Malgré ces limites, notre groupe votera cette proposition de loi qui apporte une amélioration de la recherche en cancérologie pédiatrique et un soutien aux patients et à leurs familles.


 

Tag(s) : #Au Sénat, #politique
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